Le projet « Mémoire de la Banane »

La démolition de la majeure partie de la Banane, cet emblématique immeuble de logements des Hauts-de-Rouen, donne lieu à un travail de mémoire impulsé et piloté par la Ville. Un projet citoyen, qui repose sur la participation de jeunes de 11 à 17 ans.

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Par quel bout prendre la fin de « la Banane » ? Disons d’abord le gigantisme de cette barre d’immeubles ainsi surnommée en raison de sa forme incurvée : longue de 390 m, vouée à héberger un millier d’habitants dans plus de 200 logements. Un point de repère dans le paysage des Hauts-de-Rouen, à la frontière entre le quartier de la Lombardie et celui du Châtelet.

A sa construction en 1959, « la Banane » se présentait comme l’un des plus grands ensembles d’Europe, aussi dit « l’immeuble aux 3 000 fenêtres ». Ce témoignage exceptionnel de l’urbanisme d’après-guerre, que l’on doit à l’architecte Henri Tougard (un élève d'Auguste Perret, le bâtisseur du Havre), a été récemment démoli aux deux tiers dans le cadre du NPNRU, Nouveau Programme National de Renouvellement Urbain.

Un pan du patrimoine rouennais s’est éclipsé mais son souvenir demeure, matérialisé grâce au projet « Mémoire de la Banane », qui vient tout juste de livrer son résultat : la Métropole et la Ville ont financé la conception-réalisation d’une œuvre symbolique dédiée à la Banane. Le collectif yakafokon s’est vu confier l’opération, avec comme mission d’impliquer un groupe de 14 collégiens. Au cœur du travail, Louise Granger, du collectif yakafokon (photo ci-dessus), diplômée de l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Normandie. Explications de sa part.

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« Les jeunes ont vu la grignoteuse en action sur le chantier, en ouverture de l’atelier que nous avons animé le 27 décembre au centre Malraux. Collage, écriture de souvenirs, réflexion sur la nature du monument à créer, choix du lieu d’implantation… On a opté pour un banc en béton de 12 m de long pour 40 cm de haut, en forme de modèle réduit de la Banane, orné d’une frise chronologique. »

La fabrication avec les adolescents s’est déroulée la première semaine des vacances de printemps. Après un nouvel atelier d’une journée au centre Malraux, les acteurs du projet ont produit l’objet in situ, sur un triangle de pelouse à l’angle des rues Newton et Galilée, du 23 au 26 avril.

« Les habitants étaient les bienvenus au 19 rue Newton pour voir naître cette sorte de maquette géante de la Banane, à l’échelle 1/33e. Les jeunes ont surtout illustré la frise et manipulé le bois pour faire le coffrage. Le dernier jour on a coulé le béton. Je suis originaire du Havre alors ce matériau me parle. Je trouve intéressant de confronter des enfants au processus d’une construction en béton. »

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« A travers la création de cette assise collective dans l’espace public, il s’agit de sceller la mémoire dans le sol, poursuit Louise. L’œuvre est censée être déplacée en 2028 sur le parvis de la future école rue Dunant. » Lors de l’inauguration, prévue samedi 1er juin à 11h30 à l’occasion de la fête de quartier « Les Hauts ont du talent », le public découvrira le complément du banc : à côté du monolithe, comme un prolongement, une exposition de photos s’offrira aux regards le long des grilles de l’école Villon.

C’est le fruit d’un atelier photo encadré par la professionnelle de l’image Marie-Hélène Labat, intervenue auprès de 12 jeunes pour les initier à la technique du portrait en studio. Résultat, une petite dizaine de portraits d’anciens habitants de la Banane. Marie-Hélène Labat a superposé les visages avec des photos de papiers peints des logements de la Banane prises par d’autres enfants lors d’un autre atelier l’année précédente.

Action municipale réunissant la démarche « Le débat des mémoires » (direction des Transitions) et les ateliers citoyens (service Jeunesse), « Mémoire de la Banane » comportait aussi la réalisation d’une vidéo avec le soutien de l’association Particules et un atelier journalisme avec la radio HDR à base d’interviews des habitants. Ainsi la fin de la Banane a-t-elle engendré un projet fructueux, à quatre étages.


Pour aller plus loin

collectifyakafokon.com

www.facebook.com/collectifyakafokon/

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